Lily Pinsonneault

Ma querelle, c'est aussi la querelle de tout le monde (pas tout le monde sur la terre, j'sais ben, j'pas épaisse).

Catégorie : De la petite lecture en mangeant

Vot’ crevette.

Salut mannnnnnnnn ça va fuckkkkéééée? Je viens de revenir chez nous pis je me disais qu’il fallait que je t’écrive parce que y’a plein d’affaires que je t’ai pas dites taleure dans ta chambre d’hôtel-hôpital pendant que je tenais ton BÉBÉ neuf dans mes bras pis que les membres de vos familles réunies étaient fâchés que tu me l’aies tendu en premier même si on est tous rentrés en même temps pour venir admirer ta petite crevette. J’étais vraiment stressée de l’échapper pis de donner raison à tous ceux qui me regardaient comme si y’avaient peur que je l’échappe. Des fois même je lui demandais dans ma tête de collaborer à ma non-humiliation. Je lui disais, si tu bouges pas trop, matante va t’emmener voir des shows de ce que tu voudras quand tu vas être plus grand tu paierais même pas ta bière si tu bouges pas en ce moment. Promis. Je pense qu’il m’a fait un clin d’œil. J’pas sûre, mais presque. Je pense que j’ai bien fait ça, sa tête a pas bougé.
Je suis rentrée là comme si j’allais toujours te voir quand tu viens juste d’accoucher, j’avais rassembler le peu de confiance en moi que j’ai dans la vie de tous les jours pis je m’étais convaincue que ça paraîtrait pas sur mon visage si je le trouvais laid ou ben si genre je te trouvais laide toi à cause de ce que ça fait sur le corps d’une fille un accouchement d’enfant. Je m’excuse, je connais pas ça. C’est vrai y’a eu un temps où j’allais te démaquiller dans ton lit le samedi matin pendant que tu me contais ta soirée de la veille pis dans ce temps-là je te les disais ces affaires-là de base genre :

«Sakkk t’es maganée on dirait qu’on vient d’atteindre un nouveau niveau dans ta laideur quotidienne»
«Va te brosser les dents, pitié»
«Ben non ça paraît presque pas, ils vont pas remarquer que t’as pu la moitié de ta palette d’en avant, c’est une joke on voit rien que ça c’est dégueu j’arrive pas à me concentrer sur autre chose»

Des affaires de même de bests chums qui ont pas d’enfants pis qui sont pas à veille d’en avoir. Là, je sais plus trop les jokes qu’on peut faire ou pas t’sais. Tu me dis que tu veux pas être de celles qui parlent constamment de leurs enfants, que pour toi c’est pas un trophée, c’est une étape dans ta vie que t’es prête à franchir, que c’est pas un marathon. Ben je suis désolée, mais on dirait que je connais mieux ça que toi, les enfants, parce que oui c’est un marathon pis oui c’est un trophée anyways je te connais t’es pas capable de pas me parler des petites habitudes de vie de ton chien je vois pas pourquoi tu me parlerais jamais de ta crevette. Je veux que tu saches que ça m’intéresse, ton quotidien, ça m’intéresse, ce qui t’intéresse. C’est pas parce que j’ai pas le câble pis que je me promène en bus que ça m’intéresse pas les affaires qui se passent dans tes rêves, dans ta maison, dans ton cœur de mère. C’est sûr que moi avant que je te vois comme une mère va falloir qu’il en coule de l’eau sous les ponts parce que même si t’avais un enfant scotché à ta hanche 24 sur 24 je pense que j’aurais de la difficulté à pas penser à toi qui me pognes dans le coin d’un bar pour me dire que tu me donnes deux shooters ou que tu me paies la ride de taxi pour changer d’air parce que je gâche la soirée de tout le monde.

– Qu’est-ce qui te ferait plaisir?
– De le voir.
– Ben appelle-le.
– Il vient de me laisser on dirait que t’as oublié.
– Bon ben viens, on va aller chez eux, pense à ce que tu veux lui dire, je t’attends trois minutes dans le char. Prends ton manteau pis change de face, même moi je te laisserais avec cette face-là.

Le gars avait pas voulu de moi, mais on en avait ri dans le char en revenant. C’est un don de faire rire son amie qui veut se séparer en deux de tristesse d’amour jeune. Toi, depuis que tu m’as annoncé que t’avais une crevette dans ton bid on dirait que tu t’attends toujours à ce que je me fâche contre toi ou contre la vie mettons pis que je dise : QUOI? ALORS C’EST FINI LES BIÈRES DE ROUTE? QUOI? (Bennn non, on faisait pas ça…)

On a pas dormi ensemble depuis les cinq dernières années au moins c’est fucké han on faisait toujours ça ensemble. Pis quand je me révellais genre trois heures avant toi je faisais pas de bruit parce que t’étais la pire humaine le matin. Je faisais aucun bruit pendant des heures pis souvent une des premières chose que tu faisais en te réveillant c’était de me donner un ordre. Ben pas directement là t’es futée, tu faisais juste mettons crier : «J’AI SOIIFFFFF». Là je trouve ça drôle parce que tu vas gouter à une des belles chose de la vie qu’on appelle KARMA c’est juste que toi, va falloir que tu devines l’ordre qu’il est entrain de te donner.

Je me fâcherai jamais contre ta crevette à propos de quoi que ce soit voyons. Ton enfant, je l’aime déjà comme s’il m’avait sauvée trois fois de la noyade pis qu’il avait déjà arrêté deux méchants de faire du bullying dans la cours d’école. Pour vrai. J’ai hâte de voir ses goûts, j’ai hâte de voir sa personnalité. Juge-le jamais han quand il va dire MÔMAN JE TOUCHE À TERRE quand il va toucher à terre pour la première fois. Juge-le jamais han quand il va dire MÔMAN JE TOUCHE AU PLAFOND quand ton chum va le tenir sur ses épaules. Juge-le jamais han s’il comprend pas des affaires full vite genre marcher pis manger. Toi too c’était pas ta force quand t’avais huit jours, oublie pas.

Quand je suis arrivée dans la chambre, taleure, j’ai eu l’impression que tu t’excusais en me tendant ton bébé, c’est pour ça que je t’écris. Tu t’excusais un peu en me tendant ta plus grande récente fierté et pour vrai, t’as tellement pas à t’excuser qu’on ait juste pas les mêmes passions/intérêts/passe-temps. JE NIAISAIS QUAND JE CHIALAIS APRÈS LES ENFANTS QUI BRAILLAIENT AU MAGASIN PIS QUE JE DISAIS QUE JE VOULAIS FAIRE DES ÉTUDES EN CRIMINO POUR METTRE UNE LOI LES EMPÊCHANT DE RESPIRER LE MÊME AIR QUE MOI SAUF S’ILS ME DONNAIENT 100 000$ DE LEUR COMPTE D’ÉTUDES, je te le jure. C’est sûr que c’est la fin de plein d’affaires, genre même la base comme manger un repas complet one shot, sauf que je m’en fous moi, je pense. C’est sûr que je suis tellement pas rendue là (pis mettons que je marche pas vite genre mettons j’ai mis pas mal de ciment dans mes shoes pour me rendre, c’est à se demander si je veux m’y rendre), la preuve c’est que quand je pense à ça je pense à «torcher un babe» faut pas penser comme ça han? Non? Non. Le samedi matin, j’aime bien regarder des histoires d’indiennes liées par le ventre, abandonnées par leurs parents à la naissance, qui ont finalement trouvé l’amour dans les bras d’un seul homme. Chacun son truc.
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Je vous aime, vous autres pis vot’ crevette, pis je vais toujours être là. C’est juste plus long me rendre en bus, mais j’arrive toujours pareil.

Se mettre dans la schnoutte.

 

J’ai déjà fait trois jours de char pour aller planter ma tente dans un verger de cerises avec deux de mes amis. Pendant ces trois jours de voyagement, on a dormi dans des cours de Wal-Mart pis bu du café dégueulasse de petites stations d’essence qui disaient qu’ils offraient du café pour emporter, mais que le café venait dans un verre de styromousse sans couvercle faque dans le fond aussi ben dire que je me suis brûlé les cuisses, la langue et un peu les doigts pendant trois jours v’là deux ans. C’est ça j’ai fait, v’là deux ans. Pis sérieux je le referais n’importe quand.

 

J’ai quitté mon appart où il y avait un poêle, un frigo, une laveuse une sécheuse une douche, des amis sur le party pour aller vivre dans une tente avec d’autres de mes amis pis me coucher en même temps que le soleil parce qu’on se levait à 4 :00. On dormait pas tous dans la même tente parce que des gars ça pue quand ça a chaud, pas moi. Ah moi vraiment vraiment pas. Tellement pas que c’en est gênant pour les autres………………………………… tka.
On avait un bruleur comme poêle et une glacière large comme mon portable en guise de frigo, une voiture plus vieille que nous quatre réunis pour nos déplacements.

 

À mon retour, j’ai raconté mon magnifique périple à ma coiffeuse qui revenait de ses vacances à Vigas. Elle m’a dit : «Voyons donc ma tsite cocotte coquette crotte que t’es allée te mettre dans’ schnoutte de maiggnne».

 

Se mettre dans la schnoutte.
Emprunter pour s’acheter une tévé, un char, se faire faire des ongles c’est ce que moi, personnellement j’appelle ;

Se mettre dans la schnoutte.
Essayer le crystal meth (even once)…
Voler une banque…
Croire que le gars que tu connais depuis deux heures qui dit : moi tka j’suis clean…

 

Sauf que.
Aller me sacrer dans une tente pendant deux mois, y’a rien qui ressemble moins à se mettre dans la schnoutte que ça, je pense. Voici donc en primeur, l’étendue de mes arguments que je me suis pas mise dans la schnoutte. Schnoutte. Schnoutte. Dis schnoutte sans rire :

– Une fois, les tentes ont pris l’eau, j’ai torché à grandeur, les autres filles qu’on avait rencontrées là-bas sur le verger croyaient que les gars m’avaient emmenée pour les torcher, elles se disaient que je faisais pitié un peu, sauf que HA HA pendant ce temps-là; les gars sont aller m’acheter du subway pour me récompenser d’avoir torcher l’eau, j’étais contente (sauf que y’avait des olives noires j’aime pas tant ça). Pas convaincu? Ok pas de panique je continusse.
– Après trois semaines, on est allés sur un autre verger que le nôtre, le vergeur (j’sais-tu moi) eee mettons tenancier de verger est venu nous reconduire à des vraies toilettes en quatre roues, parce que Jules et moi on avait envie de pipi. En fait j’avais envie de pipi et Jules voulait prendre une pause de cueillir des cerises pourries parce qu’en vérité, qu’on se le dise pour lui le monde entier est une toilette. LÀ, on a trouvé un miroir, on s’est regardés longtemps dedans on se disait : «Toi? Penses-tu avoir changé?» On se regardait l’un et l’autre, nos vêtements, nos visages. Pas se regarder dans le miroir comme il faut pendant des semaines, qui qui fait ça? Bon je mentirais si je disais qu’il y avait pas un miroir dans le char, mais la vérité c’est aussi que je pensais même pu à me regarder en général. J’avais l’air de ce que je pensais avoir l’air. T’sais comme quand t’es dans ton lit pis t’imagines un nouveau mix pour deux de tes vêtements, mais que finalement le lendemain quand tu l’essaies tu vois que ça marche pas? Bon c’est ça, sauf sans l’affaire que ça marche pas. Tka.
– J’étais fâchée de me voir bronzée dans le miroir, j’avais mis de la crème solaire pour la peau c’est important. C’est le genre de sujet qui faisait qu’on se pognait en gang des fois je disais : «Marc, si tu restes au soleil faut que tu mettes de la crème» il s’en foutait! OH BEN LE PETITE SALIGAUD (déf. saligaud : personne sans aucune moral) ça me mettait hors. de. moi! Je disais BEN C’EST ÇA ARRANGE-TOI. Y s’arrangeait là, il s’en foutait aussi ouais il s’en foutait je m’en souviens. Des classiques conversations que le monde dans la schnoutte a? Non.
– Un moment donné j’ai trouvé de l’électricité dans une petite cabane, après avoir branché mon Ipod deux heures ben je m’en foutais d’avoir trouvé de l’électricité.
– J’avais apporté plusieurs t-shirts; j’en ai porté deux en alternance soleil et nuages avec toujours le même top de sport rouge en dessous. On faisait des jokes sur mon top de sport à la fin, savoir combien d’autres spécimens vivants vivaient dans ce top de sport rouge-là. C’ÉTAIT FUNNY.
– Je me couchais à 8-9 heures, avec ma frontale je lisais un livre que j’avais trouvé sur une table de livres à donner, le sujet c’était la formation de groupes de résistance en Russie sous Nicolas II. Des affaires de même de monde dans schnoutte.
– Je déjeunais deux Breaktime à l’avoine avec une banane. Pendant mes jours de congé, j’allais manger des bonnes toasts chaudes avec un café en ville pis j’exagérais sur la confiture gratis.
– J’ai rencontré des filles nices pis après deux menutes on avait des insides comme si on s’était toujours connues. Quand je les croisais au village j’avais le même sentiment que si je croisais mes meilleures amies d’enfance.
– Quand il faisait chaud on se crissait les pieds dans le lac.
– Quand il faisait froid pis que ça nous réveillait la nuit, on en profitait pour abriller les autres.
– Le soir le monde jouait à des jeux trouvés dans un sous-sol d’église (j’étais pas exclue, j’aimais mieux flatter le chien yo).
– Y’avait un gars sur notre verger, y’était accro à toutes les drogues possibles, on comptait au compte-gouttes les chances qu’on y donnait, on se racontait entre nous des affaires qu’il nous disait avoir fait dans sa vie, on sait pas si on le croyait parce que si on le croyait, ben lui, c’était un vrai fouteur de schnoutte, nous on était des recrues schnoutte comparées à lui.
– Y’avait un gars il parlait juste anglais, des fois on oubliait d’y parler en anglais, il jouait quand même aux cartes avec nous autres, pis il gagnait le cochon d’anglo! pis on le félicitait parce qu’on est juste des petits côliques de yesman! Bin non on le félicitait parce que y’était bon aux cartes le petit Jon Jon.
– On avait une guitare à la gang, chacun sa classique toune.
– Des fois on s’engueulait pour des conneries tellement connes pis c’était la fin du monde parce qu’il fallait régler ça entre nous, y’avait personne d’autre que nous pour gérer ça, pis aussi on avait nulle part d’autre où aller se réfugier faque là on allait se visiter d’une tente à l’autre en parlant pas fort parce qu’une tente c’est pas ben épais, quand il pleut on s’en rend compte et quand les autres font l’amour itou.

C’est vrai que c’était souvent la fin de notre monde, mais je comprends les vieux de dire que le soleil se lève quand même les lendemains de fin du monde. Y’a aucun vieux qui m’a jamais dit ça, mais j’imagine quelqu’un qui se berce me le dire. Des fois Phil me tappait sur les nerfs, je l’aurais tué, pis j’y tappais aussi vraiment sur les nerfs faque là y s’inventait des commissions à aller faire en ville je me disais : BEN C’EST ÇA! Va-t’en donc (essssssssstik de Phil). Quand j’entendais le char revenir j’étais énervée je l’aurais frencher j’avais envie de lui dire «abandonne-moi plus jamais comme ça».

– J’ai eu froid.
– J’ai eu chaud.
-J’ai pris ma douche quand il faisait encore soleil parce que ma douche c’était un boyau d’arrosage faque si le soleil se couchait tu pouvais pas te laver à moins que t’étais le gars accro aux amphétamines (le jeu c’était de guesser lesquelles selon ses agissements).
– J’ai fini de m’essorer les cheveux et tout le monde a ri, y’a dit : Haha! Tes cheveux!
– J’ai répondu : Toi! Les tiens!
– J’ai mis la table pour le souper sur une couverte.
– J’ai joué à : «quand tu vas mourir, avec ton corps je ferai».
– J’ai été déçue de devoir jeter notre pain qui avait pris l’eau.
– J’ai eu vraiment froid.
– J’ai eu vraiment chaud.
– On s’est engueulés encore parce que j’avais pas racheté le pain le moins cher.
– On a fait trente minutes de char pour aller faire notre lavage ailleurs que dans un sceau, je me suis acheté un smootie pis même si la veille on s’était engueulés parce qu’il voulait pas mettre de crème solaire, j’ai donné des gloues à Marc parce que y’était hango pis je trouvais qu’il faisait pitié.
– On buvait deux bières pis ça nous donnait envie de se dire des secrets parce qu’on avait l’impression qu’on reviendrait jamais à Montréal.
– Un moment donné j’ai mis du mascara parce que je voulais me sentir sexy.
– Avec
Mon
Mascara
Me
Sentir
Sexy

Phil a dit : «Wow cuuuuteeee t’as mis du mascara wowowowowowow». J’ai rougi.

 

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Être dans la schnoutte dans vie je pense que c’est justement l’inverse c’est quand tu mets pas de mascara et que le monde dit : Yo ça va tu?

Les meilleures années de ma vie (3e partie).

Quand on s’est rencontré on s’est fait du grand spectaculaire comme on aime on a rien laissé au hasard de la rencontre on a voulu tout prévoir tout de suite anyways on savait. Je savais qui t’étais ma colloque m’avait déjà parlé dans ton dos je te haïssais ouais mais t’étais goodlooking on dira ce qu’on voudra ça sauve le monde être goodlooking. Avoir le choix, je serais goodlooking, je l’avoue. Je t’ai invité à un souper où je savais que je serais mal à l’aise t’as embarqué dans le jeu j’ai dit je te paie le souper pis la brosse c’est les premiers mots qu’on s’est échangés presque dans nos balbutiements de relation, t’as embarqué dans mes conneries on est allé au souper ensemble pis j’étais pas la plus mal à l’aise finalement on a gagné (dans nos têtes parce que comment gagner contre du monde qui sait pas être en compétition). Tu t’étais un peu déguisé. Tu t’étais médaillé et tu t’étais studdé ouais studdé sur les épaulettes et studdé sur les boutons de manchette, tu disais que tu t’étais déguisé en Montréal. Quand j’y pense j’ai un goût de vomi dans la bouche se déguiser en Montréal ouash come on. Ce souper-là était parfait, en sortant tu m’as prise sur ton dos dans le stationnement pour faire comme dans les films tu t’es penché par en avant pis j’ai crié ARRRRRÊTTTEE ON VA TOUTEE VOIR MON CULLLL bref les deux on avait eu ce qu’on voulait, j’étais pas mal à l’aise pis t’étais saoul.

Avec le temps t’as sorti avec ma colloque qui t’haïssait pu parce finalement, en plus d’être goodlooking t’es doux comme un minou pis gentil comme j’sais-tu un lapin genre me semble c’est gentil un lapin. Tu riais de moi quand je pensais inventer des affaires tu me poussais dans la neige quand on marchait dans l’hiver tu t’assoyais sur moi dans les partys en gros on est devenus amis. Avec d’autre monde aussi. On est devenus une petite famille. On s’appelait «La Famille». On disait qui qui va être là? On répondait ben nous autres là. C’était pas une vraie question. On se serrait toujours dans nos bras on se disait que notre choix d’amis était fini on disait qu’on s’était trouvé un peu comme la troupe de théâtre du secondaire quand on faisait des shows de fin d’année on se disait qu’on avait pu besoin de personne sauf peut-être la prof parce qu’était hot ben mettons nous on invitait du monde à s’ajouter à notre noyau de temps en temps comme si c’était la prof mais en restant toujours vraiment conscient de notre noyau. Sauf que là nous, on était pu au secondaire faque on croyait vraiment que notre choix d’amis pour la vie était définitif, c’était beau.

On allait souper au restaurant, on se faisait des demandes en mariage, on parlait trop fort, on tapait sur nos coupes, on tipait ben parce qu’on connaissait ça, les jobs de service. On inventait des nouvelles destinations, on se poussait dans la neige en s’y rendant. On se parlait de ce qu’on apprenait, on riait des zépais qui pensaient inventé quelque chose, on s’assoyait sur d’autre monde pour faire des jokes dans les partys, on pensait être capable de danser cochon on rentrait à maison je startais une batch de grilled-cheese tu te crissais le nez dedans tu me disais que t’avais l’impression de me devoir mille piasses. On inventait des recettes, on se consolait, on s’encourageait, on s’appelait par des noms d’amour, on se criait des insultes, on commentait, on s’inventait, on se promettait.

On était ce qu’on était, des meilleurs amis.

Next thing you know la vie c’est décevant comme quand tu chantes par-dessus une toune en char pis qu’on moment donné tu prends conscience de ta propre voix. On s’est fait taper sur la tête on s’est fait répéter que c’est ben beau la jeunesse la jeunesse mais qu’on peut pas en vivre on s’est fait crié que la vie c’est pas de faire le bacon sur le dancefloor du Bistro, on nous a dit de nous placer les pieds, on nous a dit que ce qu’on apprenait, c’était pas la vraie vie, on nous a accusés de rien faire, on nous a obligés à faire autre chose, sinon! On avait déjà entendu parlé du concept de vraie vie faque on a pas posé de questions, on a baissé les yeux pis on est partis chacun de notre bord. On a fermé notre yeule pis on a continué de chanter dans notre tête au lieu de chanter plus fort pour enterrer les autres voix avec la nôtre.

L’idée d’avoir une autre vie, une vraie vie, a fait son chemin. On a fait autre chose en espérant que ce soit la chose à faire pis que tout le monde soit unanime sur nos choix de choses à faire. On a fait le ménage de notre appart, on a moins partagé, on s’est acheté un micro-ondes, on a fait les recettes d’un livre de recettes, on a canné des affaires à l’automne. On s’est rendu compte que c’est dur, accéder à l’unanimité et que ceux qui nous avaient parlé d’un concept de vraie vie inventaient peut-être à mesure le concept de vraie vie parce que c’est lousse en crime le concept de vraie vie finalement pis personne a réussi à nous donner des réponses qui fittent avec ce qu’on est.

Un moment donné la roulette dans ta tête arrête, tu peux pu étirer le fil de tes pensées tu te rends compte que t’es pas élastique dans tes valeurs, ça rembobine. Ton fil de pensée de marde est rendu au boute tu peux pu enregistrer tu peux pu continuer, ta bobine dit TIME OUT maudit zépais! T’arrêtes t’as pas le choix quand t’as pu ta bobine de ton bord t’sais comment c’est ça veut dire que t’es rendu au boute de ton rouleau.

L’autre jour à un de nos soupers où c’est difficile de pas toujours faire référence au passé, on se regardait, le trémolo din yeux on se trouvait cutes, on se disait qu’on avait été niaiseux d’y croire, que ça nous rattrape toujours que y’avait pas de raison que ça nous arrive pas à nous aussi.

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J’ai changé d’idée, y’a rien de niaiseux là-dedans. On était persuadé, ça m’est jamais réarrivé depuis.

Les plus belles années de ma vie (Part One).

V’là deux semaines, j’ai déménagé à Montréal pour de bon. J’avais mon appartement depuis le premier juillet, je venais installer des petites affaires par-ci par-là, je me sentais vieille parce que j’achetais de la déco au lieu du linge quand je magasinais avec mes amis. Dans une vente de garage, j’ai acheté trois divans pareils mais pas de la même couleur pour mettre dans mon salon, je les ai installés un par un, fin de semaine par fin de semaine parce que je conduis une Toyota Tercel faque bon c’est dit. Après ça j’ai commencé à déménager mon linge, je faisais Québec-Montréal une fois par semaine et demie, quand j’avais un congé, je venais toujours avec une amie différente, on soufflait le matelas gonflable double de chez mes parents, on se saoulait, le lendemain on peinturait ou genre on allait acheter une tablette qu’on posait pas, je ramassais du mieux que je pouvais mais pas trop –c’est chez nous!- pis on retournait le soir même à Québec. La fin de semaine où j’ai finalement reçu mon lit, je pouvais pas prendre congé pour venir dormir dans mon apparte, mais ma tante avait congé, elle. Elle a demandé les clés de mon apparte à ma mère pendant que je travaillais. Je l’aime ma tante, c’est même pas ça le problème, c’est juste que j’avais imaginé que c’était moi la première à dormir dans mon apparte dans mon lit dans ma nouvelle ville. Faque j’ai pleuré parce que mon apparte, c’était mon nouveau jouet pis que même si on grandit nos nouveaux jouets on reste bébé quand y’en est question.

J’ai fini par avoir aussi une table de salon, avec des pattes en or pis le dessus en vitre, comme si j’étais quelqu’un de chic… quand même une table de salon que j’adore pour dans ma nouvelle vie adorable. J’ai à peu près deux cadres et demi de décoration (un que je vais pas utiliser pour sûr, mais que j’ai quand même mis dans mes boîtes pour faire plaisir à quelqu’un qui voulait vraiment voir ce cadre-là chez nous). J’ai trois napperons dépareillés, cinq fourchettes pis six verres, dont deux shooters.

J’ai eu mon party de départ de Québec y’a deux semaines et demie, après mon dernier shift à ma job, j’ai toujours travaillé là, c’est vraiment fucké c’est ma seule référence sur mon C.V. J’ai plein de groupes d’amis, y’a mes amis de job, mes amis du secondaire, pis mes amis du CÉGEP, y’a aussi les amis de mes cousines avec qui je me tiens des fois en ville. Je parle à tout le monde, j’pas gênée. C’était un pas pire gros party de départ, mes parents avaient fait un BBQ c’est sûr que moi j’ai juste remarqué que Jay était pas là, mais c’est entre autres pour ça que j’ai voulu m’en aller, j’étais tannée de l’espérer partout. Mes amis du secondaire m’ont fait une vidéo pour mon départ, j’ai pas pleuré même si ça paraissait que y’auraient aimé ça que je pleure, c’est pas vraiment mon genre pis moi je trouve pas ça triste déménager.

J’ai fait mon cours de Zumba fitness 1 à Québec, je l’ai jamais enseigné à date, mais pendant mon bac j’ai décidé de prendre un contrat au Centre Père Marquette dans Rosemont Petite Patrie. À ce qui paraît, quand on est étudiant à l’université, c’est tough de joindre les deux bouts. J’verrai. J’avais pas vraiment d’opinion sur la grève en 2012.

J’ai dix-neuf ans. J’ai une petite idée de comment fonctionne la plupart de mes électros, mes parents ont bien fait ça. Je trouve qui fait déjà froid dans mon appart, j’avais jamais eu froid avant, on dirait. Pas comme ça en tout cas, jamais ce froid-là. Je mets une veste pis ça change rien, je veux pas mettre le chauffage parce qu’à ce qui paraît hydro, ça coûte cher. Je verrai. Mes murs sont peinturés, j’ai fait ma vaisselle, mon linge est pas plié, mais je le plierai pas, y’a personne pour m’obliger, ça au moins c’est nice.

J’attends que le fun commence.

Y’a rien qui se passe.

Je peux pas vraiment en parler parce que mes parents s’inquièteraient, mon ex saurait que j’ai pas réellement tout le fun que je prétends avoir, pis mes amis me diraient de revenir, que c’est ma faute, j’avais juste à pas partir.

Pour dire ça poliment, c’est vrai, j’ai aucune idée de ce que je côlisse icitte.
J’étudie en enseignement du français au secondaire parce que l’orienteur m’a dit que c’était ça mon profil, en février de secondaire cinq pis fallait faire la demande d’admission au CÉGEP avant mars. J’ai fait mon CÉGEP en arts et lettres parce que y’a pas de pré-requis pour devenir prof de français au secondaire pis je voulais pas de math, ça je sais que j’haïs ça. C’est pas mal tout ce que je sais en ce moment, que j’haïs les maths. J’ai toujours haïs ça. Sinon à part ça. Je sais pas.

Dans les cours à l’école tout le monde a l’air de se connaître déjà. Je les ai vus arriver dans’ classe, on aurait dit qu’ils s’étaient fait déjà quarante deux réunions d’élèves sans moi, y’en a même une qui a complimenté une fille sur ses nouveaux cheveux. J’étais où moi pendant qu’ils se créaient des liens universitaires? Y’a du monde qui se serre dans leurs bras. C’est pas que je voudrais serrer quelqu’un dans mes bras, j’aurais juste aimé ça dire salut à quelqu’un, même sans m’assoir avec, juste dire salut, du bout des doigts, limite l’haïr dans ma tête, mais juste voir un visage familier, même pas familier, peut-être juste voir une fille que j’aurais déjà vue dans une annonce à la télé ça aurait fait l’affaire. J’avais jamais même PENSÉ que ça me ferait de quoi d’avoir personne à saluer en entrant dans une pièce. Des fois chez mes parents quand j’étais frue je partais sans dire bye pis je me sentais vraiment mal après. On dirait que dire salut pis bye, c’est dans mes gènes. C’est contre-nature pour moi de m’assoir dans classe pis de juste sortir mes crayons (tout le monde a son ordi, ça aussi je catche pas). J’ai fini par me faire un genre d’amie. On s’assoit à côté parce qu’on est toutes seules les deux, mais a l’aimerait ça me parler pendant le cours pis je trouve ça gossant le monde qui parle par-dessus le prof, faque après le cours j’y dit bye vite pis je pars. J’ai même pas bu une bière depuis que l’école est commencée, mon initiation c’était de la marde, j’étais tannée de me faire pitcher des œufs pis de courir avec une patate dans un bas de nylon entre les jambes faque entre deux activités de marde, j’ai fait un sourire à celle qui est devenue mon genre d’amie, pis je me suis poussée.

Y’a un local étudiant, je suis passée devant kek fois. Le monde se parle pis rit fort. Comment y’en sont venus à tous se connaître autant? Je catche rien. Le premier jour, ceux-là y’avaient déjà leurs agendas, pis d’autres avaient leurs manuels d’achetés pour les cours de base j’ai entendu une fille dire «ma sœur m’a dit qu’on allait full l’utiliser cel-là» quesser ça sont combien de prof de français dans famille? Je sais même pas où faire faire ma carte étudiante. Ils se récitent des bouts des livres qu’on a à lire en riant pis en comparant ça à d’autres trucs qu’ils connaissent. Le mois de septembre a l’air tellement facile pour eux, à date. Je sais que je retourne chez nous la fin de semaine du trois octobre. Ça va être long d’ici-là. J’ai passé devant un salon de coiffure l’autre fois pis j’ai décidé d’aller me faire couper les cheveux, parce qu’une femme qui se coupe les cheveux est une femme qui change de vie. J’y crois pas full, mais au moins ça m’a occupé l’esprit pendant cinquante bonnes minutes. Le gars a été smatt, il m’a posé quelques questions sauf qu’on dirait que j’allais toujours pleuré, faque y’a arrêté, c’est pour ça que je dis qu’il a été smatt.

Y’a de mes amis qui m’écrivent les plus longs e-mails d’ennui que j’ai jamais lu. Je leur «manque trop». Moi aussi je m’ennuie, mais pas de cette façon-là. Je m’ennuie parce que je sais pas quoi faire de plus. J’ai fait mon épicerie, j’t’allée au marché Jean Talon m’acheter des légumes parce que tout le monde m’en avait toujours parlé. J’étais fière d’avoir trouvé le spot, mais après ça je suis quand même revenue chez nous, toute seule. Le monde a l’air à l’aise en général, mais moi je le suis trop pas. Je veux pas retourner à Québec, mais je suis pas mieux ici que je l’étais là-bas.

Là c’est samedi faque ma mère va m’appeler vers midi parce qu’avant elle a peur de me réveiller et que je sois de mauvaise humeur. Je sais pas si je vais répondre parce que j’ai juste peur de me mettre à brailler. Je pourrais lui apprendre qu’on se lève pas tard quand on a rien fait le vendredi soir, mais je dirai rien, je veux pas l’inquiéter. Je vais me donner une chance pis un coup de pied dans le cul. J’hais les maths pis je suis pas quelqu’un de gêné. C’est juste deux vérités que je sais sur moi, mais c’est déjà pas pire, l’an passé même date je trippais tellement sur Jay que j’aurais même pas pu dire deux vérités sur moi s’il les avait pas acquiescées préalablement.

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 Ah pis r’garde donc ça, j’utilise des beaux mots. C’est vrai, chu full bonne au Scrabble. Trois vérités.

 Crédits photo : Christian Quezada

 

L’histoire qui a failli en être une.

Des fois, quand on a envie d’être avec quelqu’un à tout prix, on en fait en maudit des affaires bizarres et LÀ je parle même pas de mon amie qui, ben sua brosse a écrit à un beau gars dans son cours qu’elle avait hâte de rencontrer ses parents (elle pensait qu’en supprimant les courriels Facebook de son côté, ils se supprimeraient du sien, NÉNÉ don’t do this at home les enfants, elle a une pression dans la poitrine chaque fois qu’elle y repense). Je parle d’affaires qu’on ferait pas en général dans la vie, d’affaires qu’on dit juste pour pas rien dire. D’affaires qu’on se convainc même si c’est niaiseux, parce qu’on veut y croire coûte que coûte pis aussi parce que ben ça fait quelque chose à raconter pis ÇA c’est NICE. Raconter quelque chose, c’est NICE. Passe-moi le micro, faut que je conte de quoi. C’est comme quand quelqu’un te demande si ça va bien dans ton couple pis au lieu de répondre juste oui mettons, t’essaies de penser à quelque chose qui t’a un peu gossé v’là deux semaines parce que tu penses que c’est trop plate si tu réponds juste oui.

 

MAIS LÀ L’AFFAIRE NICE AVEC FRÉQUENTER QUELQU’UN c’est que y’a toujours quelque chose à raconter, un petit papotage, un petit penses-tu que, un petit je suis sûr que, un petit moi je dis que. ÇA c’est cool. Ça occupe l’esprit, on se rend triste pour une niaiserie, dans ce temps-là c’est cool parce que si on est du genre à parler pour rien dire ou bedon se concentrer sur des affaires tristes parce qu’on aime ça faire pitié, c’est pratique.

 

J’aimerais parler de la fois que j’ai failli fréquenter quelqu’un. Cette fois-là, est vraiment originale et même si j’ai juste failli fréquenter quelqu’un, ça m’a fait de quoi parler pendant au moins trois mois parce qu’on a failli se fréquenter pendant au moins trois mois, c’est pas rien comme semi-fréquentation. J’ai eu la chance d’en parler dans différents soupers, même quelques un des chums de mes amies proches étaient au courant parce que leurs blondes disaient : «Attends, on va lui demander, il doit le savoir, y’est un gars».

 

Finalement personne sait jamais rien on est jamais plus avancé parce qu’on se parle jamais directement parce que pour pas avoir de peine on parle en énigmes pis ben ceux autour de toi qui suivent l’aventure décrochent un peu parce qu’ils sont tannés des énigmes, mais toi tu t’entêtes à jouer la devinette.

 

PARLANT DE DEVINETTE, en avant-première :

La fois que j’ai failli fréquenter quelqu’un.

 

Ça a commencé, j’étais dans un cours à l’université et mon cell était sur vibration, ok je vais peut-être pas dire tous les détails, mais celui-ci me semble tout de même important. Or donc, vibration, c’est ma bonne amie Joke (presque son vrai nom) qui me texte :

 

Joke :

Aye, pourquoi tu
sors pas avec Banane
Tremblay déjà??

 

Banane Tremblay, c’est pas presque son vrai nom, mais on utilise des noms codés pour parler d’une fréquentation, faque imagine pour parler d’une presque fréquentation t’sais.

 

Là moi je réponds à mon amie Joke :

Moi :

Ben parce que
je sais pas c’est qui,
Banane Tremblay.

 

J’étais dans un cours faque j’étais curieuse, mais j’avais pas tant envie de texter parce que là si un moment donné j’avais une mauvaise note et que j’allais voir le prof, je voulais pas qu’il me regarde en riant dans sa barbe pis qu’il me dise: «Ouin, mais je t’ai vue texter dans mes cours». Affaires de même.

 

Alors mon amie renchérit :

Joke :

C’est un ami de
Frito Lays. Je l’ai
rencontré à matin,
y’a l’air sweet pis
y’est vraiment ton
genre. Les deux
vous venez de la
même place c’est
bizarre que tu
l’aies jamais vu.

 

LÀ ma curiosité était piquée pour le vrai parce que Frito Lays, c’était le chum de Joke faque je me disais que la possibilité de sorties à quatre m’intéressait en pas pour rire. T’sais si lui comprenait pas mon sens de l’humour ben y’aurait au moins ma bonne amie Joke pour lui montrer le chemin vers le fait que j’exagère pis j’ai toujours exagéré pis je vais toujours exagérer. Pis que C’EST BEN CORRECT QUE J’EXAGÈRE.

 

Alors ça reste de même après l’accusation de pourquoi faire je sortais pas déjà avec Banane Tremblay. Deux semaines plus tard, je vais voir un show avec Joke pis mon ami Banane (quoi ça existe deux personnes qui s’appellent pareil dans vie, bon dans une histoire aussi). Pendant la première partie du spectacle je regarde un beau grand brun avec les cheveux un peu humides sué tempes parce que même si y fait moins 30 dehors, dans les petits bars où se produisent les musiciens qui ont pas encore fait 8172 fois leurs trois tounes ben il fait toujours TornadoTemperature. Des fois, j’ai l’impression qu’il me regarde itou, le beau grand brun, mais bon bref, je vais pas faire semblant qu’il y a du suspense, entre le premier pis le deuxième show, j’en parle à Joke pis elle me dit : «Ben c’est lui, c’est Banane dont je te parlais!» On peut pas aller proche pis qu’elle nous présente parce qu’elle lui a déjà dit salut, ça ferait bizarre, il faut donc trouver une autre méthode pour initier le Hellooo Youuuuuuuu. Deuxième partie du show finie, je me rends compte que je suis pas folle, il m’a checkée lui avec, moi au moins j’étais positionnée de façon à ce que j’avais pas l’air stalkeuse, lui avait pas cette chance, STALKEUX.

 

Après le show je dis à mon ami Banane qui connaît Banane Tremblay : «Viens, on va lui dire bye». Il dit : «Ok» (pas ben ben jasant mon ami Banane dans c’t’histoire-là). Alors je réfléchis pas trop et ça donne ÇA :

Banane Tremblay : Salut, Banane!
Mon ami Banane : Salut, Banane!
Moi : Salut, Banane!
Banane Tremblay : Ah Eh Oh Eh Ah, désolé, je t’avais pas saluée, mais Eh Ah Eh je t’avais remarquée.
Moi : Ok.

Je me retourne de bord, j’sac’ mon camp.

Joke : Bye, bye là!

 

Joke me sert le bras, on marche full vite pour s’en aller de lui, on a la défaite qu’il fait moins 30, yes! Fuck off. Mon ami Banane s’allume une cigarette, j’attends qu’on soit rendus plus loin et là BOUMCHAKALAKA.

Moi : MOMAILLE GOD IL M’A DIT QU’IL M’AVAIT REMARQUÉE MOMAILLE GOD.
Joke : OUI J’AI ENTENDU MOMAILLE GOD.
Mon ami Banane : …
Moi : MOMAILLE GOD SAVEZ-VOUS S’IL DIT ÇA À TOUT LE MONDE? GENRE TOUTES LES FILLES QU’IL RENCONTRE? C’EST TU UN HOSSETIQUE DE PLAYER? Y’AIME TU LES FILLES OU BEDON LES GARS AH Y’AIME LES GARS PIS IL M’A REMARQUÉE GENRE J’AI UN STYLE QUI LUI PLAIT?
Mon ami Banane : …
Moi : BEN LÀ TU LE CONNAIS ALLER DIS-LE MOI IL ME NIAISE TU?
Joke : Bahahahhahahaaha!

(T’sais quand je disais que j’exagère tout le temps pis qu’il faut qu’il y ait quelqu’un qui sait que j’exagère pis qui prend ça à la légère.)

Mon ami Banane : … Ben là, je sais pas moi, c’était genre mon ami au secondaire. Y’est pas gai.
Moi : Ahhhh laisse donc faire, m’a m’arranger toute seule. Bon votre bus est là, CIAO.
Joke : Hey on s’appelle demain on en reparle!
Moi : Yes!

 

Pendant que je me rends chez nous, je reçois ça :

Joke :
Pis là, tu vas
faire quoi?

 

Moi :
Laisse-moi y
réfléchir.

Ayoye c’est tellement long le début de notre quasi-relation j’en reviens pas comment c’est long pour une relation qui a jamais existé. En tout cas je continue.

Ce à quoi j’avais réfléchi, ben c’était à l’ajoutement (ajoutation?) sur Facebook et je l’avais fait pour lui signifier mon intérêt. Y’a eu par la suite, les conversations un peu poches mais excitantes qu’au lieu de dire : «On a chatté» on dit : «On a parlé». Attends je vais copier-coller un exemple :

Ahh non je suis allée chercher nos conversations, non, je vais pas faire ça, ça laisserait ben trop entrevoir ma vulnérabilité mettons quand je dis : «Salut, l’épicier de profession» vue qu’il travaille comme commis dans une épicerie. Ouash pourquoi personne m’a jamais dit de juste fermer ma gougoune y’a tellement personne qui se parle de même dans la vie, moi la prochaine fois que je rencontre un gars j’aimerais ça que ce soit genre dans une ligue de soccer amicale genre qu’on commence notre relation en se donnant des coups de coude dans le ventre, tout le reste c’est de la bullshit. En 6e année, mon amie pitchait des roches au gars qu’a l’aimait, that’s it, c’est de même que ça fonctionne. Le gars l’a aimée jusqu’en secondaire 2.

 

En tout cas, le gars (Banane Tremblay, épicier) avait l’air de quand même aimer ça, mes calls poches, sauf que les deux on voulait pas avoir l’air trop intense faque on disait juste : Tu fais quoi en fin de semaine? T’as fait quoi aujourd’hui? C’est drôle parce que cette nuit, j’ai rêvé que… (BLABLABLEUUUHHH)

Un moment donné, je l’ai invité à voir un show en disant ça :
Vas-tu voir **** *** ****?
Il a répondu : C’est où?
J’ai répondu : Sala Rossa, je dis souvent ça vraiment vite pour faire comme si je parlais italien, ça pis Pepperoni.
Il a dit : Moi too!
On s’est rejoint là-bas sans plus de préambules. Moi, j’étais allée avec d’autre monde parce que je savais pas si «moi too» ça voulait dire qu’il venait pis aussi je me disais que je voulais pas que ça fasse trop date. Finalement, y’était là, c’était super le fun comme soirée sauf que y’est parti sans me dire bye. C’est ben sûr que moi je me disais qu’il m’avait trouvée laide, mais non quand je lui ai demandé des explications (sans trop insister, quand même wohh j’pas accro) il a dit qu’il travaillait tôt le lendemain… Beoooonnn ok…
J’ai demandé à mon ami Banane quoi en penser et il m’a répété qu’il se tenait avec le gars au secondaire. Faque là on ajoute deux autres semaines de pas-fréquentation à l’histoire de pas-fréquentation jusqu’à ce que je lui donne mon numéro parce que je me dis que malgré toute sa bizarreté, y’est smatt pis beau pis drôle. Il me texte! Yes! Faque là on lâche Facebook pis on se met sul texte, mais ça donne rien de ben ben plus pour être honnête. Sauf un moment donné, quand il est en entrevue à la radio avec un autre membre de son groupe de musique (ouais quand même… I knoww… yeah yeah you knowww), un des membres du groupe fait un jeu de mots douteux avec mon nom de famille quand ils parlent d’une toune d’amour faque là je me dis ben voyons???????????? J’AI UNE IDÉE : je lui écris une énigme pour qu’il sache que j’ai écouté l’entrevue à la radio. Il répond : Nice!
Moi je me dis : Nice, y’a compris mon énigme!

On rajoute deux semaines à la pas-fréquentation pis là finalement il me texte une réelle invitation un certain soir, je décline l’invitation parce que c’est loin et tard, il me dit qu’il est déçu, je suis mal à l’aise, on se reparle pas. Deux semaines plus tard il me demande si je suis partie en voyage, je dis : Non? Pourquoi? Il accuse mes photos Facebook… je dis : OK.

C’est presque fini ma longue histoire courte.

Six mois plus tard, Banane Tremblay pis Frito Lays (chum de Joke) se retrouvent à prendre une bière ensemble. Ils papotent de tout et de rien, puis enchaînent sur le sujet de Moi. Banane Tremblay avoue à Frito Lays qu’il avait jamais catché que j’étais intéressée à lui. J’avais fait trop de devinettes, trop d’énigmes. En même temps, il se trouve niaiseux aussi. Ils nous traitent de nonos. Quand Frito Lays me raconte ça, je nous trouve aussi très nonos.

 

***

 

Je me flatte la bédaine en écrivant cette histoire. Et oui! Je vais bientôt donner naissance à notre deuxième enfant. On part en voyage humanitaire toute la famille ensemble avec le groupe de musique de mon mari, Banane Tremblay, d’ici Noël. Un an après toute cette histoire, on s’est revus, on s’est aimés tout de suite… BEN NONNNNNNNN rien pentoute.

 

Je l’ai jamais revu, je lui ai jamais reparlé.

 

C’est vrai qu’on l’a été, nonos. On avait tellement peur d’avoir l’air de celui qui quêtait qu’on a même pas pensé que l’autre comprendrait pas où on voulait en venir. Les deux on s’est dit que l’autre avait autre chose de mieux à faire, ailleurs, sans nous, pis au lieu de se dire qu’on avait rien à perdre, on s’est trouvé niaisieux chacun de notre bord.

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C’est plate de même! Ça se peut même pas, tapper à l’ordi en se flattant la bédaine, t’aurais du t’en douter.

 

 

 

 

 

 

Le magasinage en ligne.

Bon, faut tu que tu réécrives au gars de Tinder qui t’as pas redonné de nouvelles ou pas? Wooafffffffffffffffffffff OK. Let’s go.

Je suis la première à défendre Tinder. Je trouve ça cool, Tinder. Je trouve qu’on est en 2018 pis que quand t’es quelqu’un qui a les mêmes amis depuis 2001, ça complique les affaires pas mal quand l’envie te pogne de dire à quelqu’un comment tu t’appelles pas fort dans l’oreille en essayant de pas réveiller tes colocs. T’as fait le tour des potentialités potentielles depuis 2011, les ceux-là que tu dédaignes pas sont bests avec ton ex ou genre ex de tes bests pis t’es aussi vraiment tannée que quelqu’un te présente son ami célibataire juste parce qu’il est célibataire, même si toi tu donnes dans l’horticulture pis que lui y’a des gaz qui portent son nom parce qu’il s’appelle Monsieur Schiste (pas dans la vraie vie, mais dans son cœur oui faque ça compte).

D’abord le concept à propos duquel tout le monde est fâché, genre tasse à droite si oui tasse à gauche si non, moi aussi je suis contre parce que gauche c’est le côté du cœur alors il faudrait tasser à gauche pour aimer (je suis trop romantique). Non sans joke je suis plus ou moins contre le concept parce que anyway dans un lieu public tu fais déjà ça, la différence c’est que la personne est un peu moins au courant quand tu le fais sur ton téléphone que quand ton amie vient «te sauver» de lui parce que tu le trouves trop dégueu d’avoir de l’intérêt pour toi.

L’AFFAIRE C’EST QUE. Quand tu tasses à gauche, tasses à droite, t’es tout seul chez vous. C’est là là là là là que je bogue un peu. Didididididididiidididid. T’es dans ton lite, pendant la canicule, en bobettes, le ventilo pointé sur toi, tu prends ton pouce ou ton index pis tu fais ton choix. Rencontrer? Oui! M’habiller pour le faire? Non! Tu magasines en ligne, dans le confort de ton ventilo. BEN DEMANDE TOI PAS POURQUOI ÇA FITE PAS TOUJOURS LE LINGE QUE TU COMMANDES TU L’ESSAYES MÊME PAS AVANT DE L’ACHETER. C’EST UN GUESSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSS encore et toujours un GUESSSSSSSSSSSSSSSSSSS (pas la marque). Encore là, je suis même pas encore contre, tu tu peux ben magasiner en ligne si tu veux, j’ai deux trois amies qui font juste ça tout le temps pis ça fonctionne toujours, tant mieux pour elles, moi je l’ai fait une fois pis j’ai reçu un manteau d’hiver en papier ciré hossetique. Quand tu vas au magasin, tu trouves que y’a l’air chaud, y’a l’air de ta taille, faque tu l’essaies (le manteau), quand ça fonctionne pas, tu t’en vas, tu dis Merciiii quand même, après ça tu chiales que le magasinage c’est pas pour toi, mais tu te dis pas que c’est fini pour la vie pour toi, les vêtements. Souvent c’est quand tu cherches pas que tu trouves le parfait petit kit de soirée (ayoye je pense que j’ai de quoi parce que le petit kit de soirée tu le portes quand même juste une fois par mois quand t’as envie de te sentir olé olé, pas tous les jours pour aller travailler ouin ouin ouin faudrait j’écrive une thèse sur le parallèle possible entre tit kit et tite vite).

Alors on continue, faut tu que tu réécrives au gars de Tinder qui t’a pas réécrit. Bon. T’as tu l’air accro? T’as tu l’air désespérée? Booooaaaffffffffff. Est-ce que y’avait autant de fonne que toi quand vous êtes allés prendre un café ou ben si tu parlais toute seule en faisant des grands gestes dans le restaurant en réinterprétant devant lui une choré que t’avais inventée un été à treize ans avec tes bests sur Barbie Girl? C’est ÇA la vraie question. As-tu fait ça? Si non, tu peux lui dire que t’as passé un bon moment et que t’aimerais remettre ça. S’il te dit que t’es accro pis que t’as l’air désespéré, ben il te dira ça. Tu t’en rappelleras pu ben vite. On est tellement bien faits. Si tu penses toujours aux bons moments passés avec ton ex que t’haïssais semi quand vous vous êtes laissés, ben tu vas oublier ce psycho-là aussi vite que quand ton ex a pas pris ta défense devant ses parents qui t’accusaient de manière détournée pas faire grand chose de ta vie. Si t’as pas d’ex, ben profites-en st-simonak de st-ciboulette coupée au ras la touffe! C’est complètement faux que c’est une tare. C’est une des plus belles choses au monde une première relation, t’es full pas désillusionné pis tu t’imagines vraiment que ça va durer toute la vie, laisse personne te gâcher ça surtout pas un vieux psycho qui t’accuses d’être accro parce que t’essaies de goûter aux petits bonheurs de la vie à deux pendant que lui aime mieux aimer encore son ex qui a fait semblant tout le long de son voyage en Asie qu’elle faisait ça pour leur couple pis que finalement est revenue le laisser au Québec huit mois plus tard pis lui l’attendait comme un amoureux-niaiseux à l’aéroport avec des fleurs. Ayoye je suis romantiquette aujourd’hui 🙂 .

Cette personne là là que t’as vue une fois dans ta vie, si elle a tout cet impact-là sur ta vie en ce moment, c’est que tu la laisses avoir tout cet impact-là et c’est là que moi je dis WOH j’ai dit WOH (à la Vincent Gélinas). T’avais donc ben envie que quelqu’un te gère! Je suis pas certaine que ce soit très sain de rencontrer quelqu’un une fois et de lui donner tout ce pouvoir-là sur ta vie. Tu connais pas cette personne-là et elle ne te connaît pas non plus. C’est tout, c’est ça, vous êtes des inconnus qui essayez de vous connaître, tu peux pas forcer quelqu’un à vouloir être ton amie à quatre ans, tu peux toujours pas à trente-deux. Maman t’aime quand même, pleure pas bébé. Ceux qui ne te connaissent pas au quotidien et qui ne connaissent pas tes combats peuvent pas et doivent pas avoir un impact dans ta vie (bon là je suis tu obligée de préciser que je parle pas mettons d’évantrer tes poubelles sur le balcon de ton voisin pis que là quand il te le reproche tu dis : WEEssstique tu me connais pas, de quel droit tu me dis de mettre mes ordures dans un sac dans la rue et pas éparpillées sur ton balcon MARCHES-TU DANS MES SOULIERS !??! ………………………………………).

Moi quand tu me dis que t’es comédienne, mais que je sais que tu dis ça avec un sourire en coin parce que t’as fait de l’art dramatique en secondaire quatre, je trouve ça très drôle, si lui te dis que c’est bizarre, ben c’est qu’il comprend pas ton humour, c’est ça que je veux dire. Pis aussi peut-être qu’il te trouve laide. Toi aussi t’en trouves laids des gars que moi je trouve beaux. On a le droit de pas être attiré envers quelqu’un, mais on a pas le droit d’y dire, ça c’est suuuuper poche. Même si la personne te supplie de lui dire, tu sacres cette info dans ton jardin secret pis tu la déterres juste quand on va creuser ta tombe.

Une affaire que tu dois te demander SUR UNE BASE HEBDOMADAIRE quand tu te downloades Tinder c’est : Pense-je tu plus à mon compte Tinder qu’à mon hygiène? Genre est-ce que la première chose que tu fais en te levant, c’est d’aller voir tes réponses, genre dors-tu moins bien depuis ton « abonnement »? OUI vois-ça comme un abonnement. Tu penses pas toujours à utiliser ton abonnement au gym, dis-toi la même affaires avec ton abonnement à TINDER! Te réveilles-tu pour checker tes matchs? Est-ce que ça fait partie de tes sujets de conversation plus qu’une fois sur deux? (Si t’es assise avec ta chum en bobettes devant le ventilo pis que vous faites ça ensemble, je considère que ça a le droit d’être 2/2) Est-ce que tu te connectes sur ton compte plus que mettons trois fois pendant des soirées entre amis? Est-ce que des fois tu penses à ça au lieu de faire autre chose qui pourrait être utile à ta vie mettons du vélo, du jogging, de la bouffe, ce projet de roman que tu remets toujours à plus tard (je suis trop cute)? Est-ce que tu trouves ça bizarre que je te dise que personne a le droit de te gérer pis que finalement je me mette à te gérer? En passant c’est pas ma faute je suis gémeaux même en troisième année je gérais les autres dans mon équipe de tits bureaux collés les uns face aux autres.

CE QUE JE VEUX DIRE C’EST QU’À mes yeux, le temps que tu passes sur Tinder, tu pourrais le passer à faire mille autres choses, mais dire ça, ça sonne ton hossetique d’ami en couple qui l’est à peu près depuis le temps de ta choré sur Barbie girl, qui dit que tu vas finir par trouver la bonne personne si tu prends soin de toi (?). C’est à cause d’amis comme ça que je suis complètement pour Tinder, parce qu’ils sont aussi le genre à te présenter l’ami gai de leur ami gai juste parce que t’es gai. Sans tenir compte que t’as des critères de sélection amoureuse autres que l’orientation sexuelle. Réécris-lui donc au gars sur Tinder. Je suis POUR Tinder parce que si tu veux être en couple, je te souhaite de l’être, si tu veux la job je te souhaite de l’avoir, si tu veux baiser ben je te souhaite que ça t’arrive.

Barbie Girl

 Manger des chips aussi c’est le fun, sauf que si tu parles toujours de quelles chips t’aimerais manger, dans quelles circonstances, que je te pogne toujours sur le site de Frito-lay, que tu dors plus la nuit à cause de ta nouvelle passion pour les chips et que tu commences à te rendre triste avec ça parce qu’aucune saveur ne sait satisfaire ton envie insatiable de palpiter des papilles, je te dirai sans doute que les chips ont pris une trop grande place dans ta vie et je t’inviterai aussi, à ce moment, à ouvrir ton estomac à d’autres aliments.

Mon ami Peter.

Salut, je sais que c’est un été un peu poche pour toi (pas dans le sens que moi je trouve ton été poche, c’est juste que je sais que toi, tu le trouves un peu poche à première approche faque je dis que c’est un été un peu poche pour toi, tka t’as compris).

Tous tes amis postent des espèces de photo de voyage sur lesquelles ils ont les bras din airs, les cheveux dans le vent, un sourire plus gros que ta panse, t’en demandes même pas autant tu voudrais juste deux petites secondes pour toi, faire autre chose que ton lavage pendant tes journées de congé mais tu peux pas faut que tu travailles à la sueur du front de ceux qui en ont tout le tour de la tête, je sais. Des fois on travaille on sait plus trop pourquoi, mais on sait que c’est la chose à faire faque on le fait, des fois aussi on se dit : Côliss ousser qui le prend son argent lui côliss, en pensant à notre ami qui est toujours rendu au Vietnam Cambodge Surinam Minnesota name it pis que quand il revient il se tappe une petite vacance chez ses parents au Lac Memphré pour se reposer de son autre vacance pis moman lui fait du thé glacé plus-que-fait maison genre fait à la main de la part de moman parce qu’elle est fière de son chérubin pis des noms d’exotisme qu’il lui rapporte à énumérer à ses amies.

Ayoye j’ai ben de la haine contre le lac Memphré je m’excuse, c’est pas pour ça que je t’écris. Je t’écris aujourd’hui parce que je veux te parler de mon ami Peter. J’ai mis du temps à l’appeler mon ami Peter, mais maintenant que c’est fait, mon ami Peter ça sonne ben trop ben c’est sûr que j’arrêterai jamais de le dire. Mon ami Peter, c’est un gentil géant qui a choisi, à un moment donné de sa vie, d’être heureux, mais je te le jure là, heureux tout le temps. Pis il me l’a pas dit là, je l’ai deviné, je l’ai deviné plein de fois de suite qu’il avait pas toujours été celui qu’il est, mais que là, l’heureux bonhomme que je connais, il l’est pour de bon. Des fois je me questionnais à savoir si son bonheur m’importunait, pis la réponse ben c’était non parce que Peter c’était un vrai heureux faque il faisait pas chier avec le fait qu’il l’était, il l’était, juste, pis ça lui suffisait.

J’ai connu mon beau grand ami Peter l’an dernier à mon travail, c’est lui qui m’a formée. C’était mon formateur. La journée a commencée par lui qui se penche vers moi (géant je l’ai dit tantôt) et qui me demande : T’es prête à ce que je te bombarde d’informations??! J’ai répondu oui. Un petit oui timide des premières journée de travail qui a rien à voir pentoute avec ton oui que tu réponds genre à ton coloc quand il te demande pour la 14e fois ton chèque d’Hydro en fin de session. Toute la journée qui a suivie, il me bombardait d’informations, j’avais envie de dire : Calme toi mononc !!!! mais je disais rien ça aurait été con je lui avais dit que j’étais prête. Sur son chandail, c’était écrit : Peter the Butcher. Je travaillais dans les cuisines d’un resto et étant donné que c’était sa fête le jour même de mon embauche, il a fait une tarte à la viande pour tout le monde.
-Take your slice, it is my birthday!
-Thank you, Peter!
-Myyyyyyy pleassuuuuuureee! (Voix de baryton-ténor style)
J’ai oublié de dire qu’il s’était apporté un chapeau de fête qu’il portait fièrement en attendrissant sa viande avec son gigantesque marteau. Il attendrissait sa viande sur une petite table posée sur une table parce que les tables normales étaient trop basses pour lui, avec son chapeau de princesse de Disney. Première journée de travail accomplie, le gentil géant me demande mes impressions, je pogne mon bike et je me dis que j’étais pas si pire, genre d’affaire rare une première journée de travail.

Je commençais à travailler à 7:00 faque des fois j’avais un petit peu de difficulté à commencer ma journée parce que j’étais un peu en criss que mes colocs commencent à travailler à 9:00 genre (quand on a envie d’être en criss on se trouve des raisons han on est tous pareils inquiète-toi pas). Peter arrivait vers 7:30 sur son grand vélo de géant, il le stationnait derrière le restaurant comme si c’était un chopper. Il mettait sa calotte de travail, se tappait dans les mains, les frottait fort fort entre elles, se penchait pour que je puisse le voir entre deux tablettes de la passe et disait : Goooood morning!! How are you? Je pouvais pas m’empêcher de sourire, même si tout le reste du matin je sacrais à l’intérieur, je disais: I am good, Peter, how are you?? Et il répondait des trucs du genre : Awesome, Terrible, Greeeat avec cette même voix tonitruante de tarte à la viande qu’il allait chercher dans son nombril. Des fois avant qu’il arrive je me disais : je vais lui dire que je vais pas bien, il doit savoir que je suis en maudit contre l’équipe du soir qui a tout fait son close tout croche. Une fois je lui ai dit, il a ri, il a dit : So, what are we going to do with that? Je savais pas quoi répondre je voulais juste chialer pour chialer, je voulais rien faire moi, j’avais rien à faire, c’était la faute de l’équipe du soir, je voulais que l’équipe du soir fasse quelque chose!

Des fois pour me reprendre de mon pas beau bonjour comparé au sien, je lui faisais un café qu’il acceptait avec un grand sourire dans sa grosse barbe de géant, il me disait des affaires comme que j’étais great, que j’étais awesome, ça te start bien une journée. Il me demandait toujours ce que j’avais fait la veille, comme si j’avais eu une journée de congé. Au début, je disais : Rien. Et là il disait : Oh, that’s sad! Je comprenais pas ce qu’il voulait que je lui dise, je travaillais avec lui de 7:00 à 18:00 pis il faisait comme si rendue chez nous j’avais pas juste envie d’être frue du fait que je travaillais encore le lendemain à 7:00. Lui y’avait toujours quelque chose à dire, souvent, ça incluait Roseline, sa femme. Souvent, c’était des estiques de niaiseries comme que Roseline lui avait montré comment utiliser quelque chose sur son ordinateur, ou ben ils avaient regardé des photos ensemble, ou ben y’avaient jouer aux Dominos pis y’avait gagné. J’étais contente pour lui, mais quand même, y’a des estiques de limites au small talk que je me disais.

Dans ses pauses, Roseline venait le voir, il s’acotait sur quelque chose de plus bas pour être à sa hauteur ou bedon elle se perchait sur une caisse et ils se cruisaient des yeux. Je sais ben pas ce qu’ils trouvaient à se dire, mais ils riaient souvent. Des fois elle venait le porter au travail très tôt le matin et les deux avaient les cheveux encore mouillés de la douche.

Rapidement, j’ai trouvé quoi dire à Peter, je lui contais les films que j’avais écoutés, on en parlait en cuisinant, j’avais moins l’impression de travailler. Des fois je rentrais avec une giga liste de choses à faire qui me faisait faire des palpitations. J’allais en parler à Peter et il m’aidait à l’organiser, même qu’il m’aidait tout court à la faire des fois. Rendu au soir, quand je pensais pas avoir fini avant encore des longues heures, il me montrait les fonds de gâteaux qu’il avait faits sans que je m’en rende compte et je savais ce que ça voulait dire, mais il le criait quand même : You!!!! Get out of here!!!! J’ai compris à ma dernière semaine de travail que Peter, c’était mon patron. Il me l’avait jamais dit. Il me l’avait jamais fait sentir. C’est sa belle blonde qui me l’a dit. Tous les autres chefs cuisiniers avaient Chef d’écrit sur leurs vêtements de travail, pas Peter, la hiérarchie, ça l’intéressait pas. Peter y’avait choisi un moment donné quelque chose comme la simplicité contente ou le bonheur tranquille de paix heureuse j’sais tu, une affaire de même de mots qui en renchérissent un autre. Le staff dans un resto, ça va, ça vient. Ça fait chier souvent. Un jour j’ai annoncé mon départ à Peter, il m’a dit que j’allais lui manquer et m’a aussi dit que son nom, ben c’est Pete, mais qu’il aimait que je l’appelle Peter. J’ai pointé son vêtement et en même temps j’ai réalisé que c’était écrit Pete the Butcher, no Peter, no? No.

Depuis mon ami Peter, j’ai continué à travailler dans des restaurants, avec tout ce que ça implique d’affaires gossantes et stressantes, mais j’ai toujours essayé de faire en sortes que le monde avec qui je travaille ait jamais l’impression qu’on était pas une team. C’est ça, je pense, choisir la paix tranquille heureuse calme.

Mon ami Peter

Pis souvent quand on choisit ça, l’été est plus léger et agréable pis nous aussi on a envie de crier les bras din airs même si on est pas genre au Machu Picchu genre.

Photo : Christian Quezada

Vieillir loin.

Salut! Je suis dans l’avion, Rio de Janeiro c’est fini. Pour encore quatre ans, si je me fie à nos envies de toujours revenir. On a convaincu nos amis Gustavo pis Fernanda de venir nous visiter à Montréal, ça a pas été ben ben compliqué, juste de leur dire qu’on a des systèmes de chauffage ça les a convaincus. Gustavo parle beaucoup encore, il est très intelligent, je sais pas si j’avais jamais su qu’il était économiste ou ben si je préférais me rappeler autre chose de sa personnalité. Quand on s’est dit bye on était tous tristes de se quitter, c’est poche aimer autant du monde que tu peux pas avoir proche. Sans doute que ça fait que je les aime plus aussi je sais pas trop, des fois je comprends même pas ce qu’ils disent pis je les aime quand même, peut-être que j’aime l’image que je m’en fais, le beau couple de gentils cariocas qui ont les valeurs à la bonne place.

C’est drôle parce que quand je les ai rencontrés, ils m’avaient pas marquée particulièrement, en fait je pensais toujours au gars que j’avais rencontré à Sao Paulo, celui-là même avec qui j’avais commencé à croire au destin. On s’était rencontrés deux fois par hasard dans une des plus grandes villes du monde, je me disais que rien arrive pour rien. Aujourd’hui je sais que j’avais aussi rencontré deux fois deux filles ben simples de Gatineau pendant le même voyage, deux fois elle aussi, pis que ça m’avait pas fait croire au destin. Je pense que quand on croit juste au destin qui fait notre affaire c’est un peu bébé pis pas vrai pentoute.

Si tu voulais savoir, j’ai pas revu le gars de Sao Paulo. Je lui avais écrit pour le revoir, il m’avait dit qu’on trouverait ben le moyen de sortir prendre un verre, il ma réécrit le jour de mon départ qu’il était vraiment désolé de pas avoir pu m’écrire plus tôt. Venant d’un dude qui travaille pour Google, j’ai ben compris que ça y tentait juste pas tant. Tout le monde y est allé de sa propre hypothèse, moi j’en ai une aussi, elle s’intitule : « Salut, je suis un gars qui va avoir trente ans qui est en relation avec une cute fille de mon âge pis j’ai pas envie de mettre ma vie sur pause pour aller me saouler avec une fille que je connais pas et devoir expliquer à ma cute fille de mon âge que c’est le destin pis qu’elle peut rien y changer si j’ai envie d’aller me saouler avec mon destin ».

Fernanda a fait de la lasagne pis on est ben contentes d’en manger, fuck le riz pis les beans han comme on dit. Depuis notre dernière visite, ils ont eu un bébé, un vraiment beau bébé. On joue avec le bébé, ça me fait du bien de mettre mon voyage sur pause deux petites minutes le temps de me faire apprivoiser par un bébé magnifique qui demande rien d’autre que des beaux sourires pis qu’on l’aide à apprendre à marcher. On avait apporté de la bière, mais Fernanda peut pas en boire parce que son bébé mange ses seins pour déjeuner dîner souper. C’est correct, on continue de parler. On parle de nous pas mal, je parle mal de moi parce que je sais pas par où commencer, quelques classiques malaises signés moi-même, des fois je pogne le fix sur rien parce que j’essaie de réaliser que je mange de la lasagne chez mes amis à Rio. Notre autre  amie Karen arrive entre temps avec son chum, autre classique malaise quand je leur demande si y’habitent ensemble, j’avais mal vu les dernières photos sur Facebook, son nouveau chum est plus foncé, c’est pus le même que les dernières fois. On parle de nos amis communs au Canada, ils s’informent à savoir s’ils vont se marier, on dit nonnnnnn c’est pas comme ça que ça fonctionne, ils comprennent, on comprend que Karen déménagera pas pentoute tout de suite avec son nouveau chum.

Le temps est compté tout le temps est compté quand t’as des amis qui habitent à Rio tu sauras, faut que tu comptes tes menutes passées avec eux parce que c’est des menutes que tu prends aux quatre ans quand tes chanceux ou ben aux dix ans ou ben une fois dans ta vie. La preuve, Claudie s’est acheté un Redbull en y allant : « Je les vois pas souvent, je veux maximiser mon temps ». J’ai compris même si je m’en suis pas acheté un, c’est juste que je trippe pas Redbull.

Gustavo arrive de travailler, y’embrasse ses bébés, sa belle blonde, son beau fils, son amie Karen, son chum bronzé pis ses amies blanches comme la neige qu’on a trop eue cette année. Y’est tellement content, on le voit avoir les yeux mouillés, mais on dit rien ni une ni l’autre. Nous on a eu toute la journée pour se dire comment on avait hâte, lui il travaillait. Il nous dit qu’il est vraiment content d’arriver chez lui ce soir-là parce qu’il adore la lasagne. Première joke de la soirée, en passant merci de comprendre que je suis juste pas tant capable d’en faire en portugais, mais que ça veut pas dire que je comprends pas les tiennes buddy.

Il range les jeux de bébé dès qu’il arrive au salon, un peu nerveusement, il met de la musique sur la télé. « On va faire semblant qu’on est encore capables de recevoir des gens ». Gustavo et Fernanda ont rencontré Claudie ben sua brosse à Bonito dans une auberge de jeunesse, ils les ont invitées elle pis une autre fille à rester chez eux. Ils se sont saoulés pendant quelques jours, les filles sont reparties. J’ai hérité de cette amitié post-brosse-là l’année d’après quand j’ai étudié au Brésil. Je suis ben contente. Vive la bière.

C’est quand même stressant de savoir si on a encore des amis dans un autre pays même si on peut pas boire de bière parce que notre bébé mange nos seins pour souper. On s’en est bien tiré. Gustavo avait chaud dans le front, c’est normal faut parler vite quand les minutes sont comptées je l’ai dit tantôt. « Alors, qu’est-ce qui s’est passé à Montréal? » On lui raconte pas mal de trucs, on s’informe gros moi pis ma chum de fille. C’est important. La première fois que j’ai voyagé pis que quelqu’un m’a demandé la capitale du Canada pis que j’ai pas su quoi répondre, je me suis donné le goût de me renvoyer moi-même dans mon propre pays en apprendre un peu sur mes shits avant d’aller faire ma fraîche dans d’autres pays. Avec un beau petit coup de pied dans le han bon. On ose finalement leur demander :
– Alors, qu’est-ce vous pensez de la coupe du monde au Brésil?
– Ils nous ont pas consulté, c’est dommage. Le Brésil est une démocratie et les gens en sont de plus en plus conscients, c’est une bonne chose, mais il y a encore du travail à faire. Moi, je suis plus qu’un vieux communiste à la retraite, je travaille dans un gros bureau, du mauvais côté de la force.
– Je vais manifester pour toi, Gustavo, j’ai étudié en littérature et je n’ai pas d’enfants.

Il sourit. Ça joue rough pour le copain-bronzé-avocat de Karen, mais on est chez Gustavo et Fernanda, tout est permis.

– Vous allez voir les filles, voyager quand on vieillit, c’est pas la même chose, on n’est plus aussi facilement émerveillés, c’est une bonne chose que vous vous promeniez beaucoup. Dès qu’on les a rencontrées à l’auberge ces deux-là, on savait qu’il fallait en prendre soin. On a toujours aimé les enfants, c’est comme si elles étaient les nôtres. On espère que d’autres feront la même chose pour nos enfants un jour.

Ah, donc il y a peut-être un destin et il n’aurait rien à voir avec Francisco.

– Détrompez-vous, c’est bon de vieillir. C’est seulement qu’on apprécie plus la sécurité, d’etre confortable, etc. Still we are backpackers, Fernanda est encore la première à sauter dans un lac situé sur le sommet d’une montagne au Mozambique.

J’ai pas peur de vieillir dans le sens avoir des rides. J’ai peur de recevoir un jour chez moi le fils de Gustavo pis Fernanda, pis pleurer quand je vais le voir, pis avoir juste envie de lui dire : « Je t’ai connu grand comme ça ». Je me souviens quand le monde me disait ça quand j’étais jeune, je m’en torchais comme c’était pas permis. Mais un jour ça va être moi cette madame-là gossante. C’est ça que j’hais dans le fait de vieillir. Ça pis le fait qu’après que Fernanda pis Gustavo soient enfin venus à Montréal, je sais pas quand je les reverrai, je partagerai peut-être plus de soupers avec eux, peut-être juste des souvenirs. Ça me rend folle, je pensais jamais à ça avant. Je vieillis pis c’est bizarre de m’en rendre compte à Rio de Janeiro.

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Je pense à mon nouvel appart à Montréal, mes coussins, mes rideaux, mon poêle, pis je les trouve confortables. Je pense à toi aussi, je suis pas habituée que quelqu’un m’attende, je suis heureuse que tu m’attendes, mais still, chu une backpackeuse je pense.

Mes beaux cheveux blond soleil couchant.

Estique que ça vend la nosta. Tout est fait en fonction qu’on soit nostalgique, on est tellement nostalgique qu’on dirait que c’est pour ça qu’on est né. Normal estique, on est né avec une caméra din mains pour se faire dire : Va te mettre devant ce beau building-là, on va prendre une photo, din coup que te souvenir que t’es allé ça suffit pas, din coup que tu te crois pas que t’es allé là tant que tu te vois pas sur la photo. Tant qu’à, prends donc ton bol de céréales en photo! Din coup que tu te crois pas toi-même dans quatre ans que t’as mangé ce beau bol de belles céréales-là, ce matin-là, avec cette cuillère-là. Prends-lé en photo ton beau bol couleuré, faut que tu sois ben ben certain de t’en souvenir. Din coup tu te dis : «Ben eeee non pense pas avoir déjà mangé ça». BEN LÀ T’AURAS LA PREUVE que t’as déjà mangé ça, pis ça, c’est quand même nice, parce que comme ça t’es pas pogné à tout regoûter deux pis trois pis quatre fois dans ta vie. Faudrait pas passer notre précieux temps à goûter pis regoûter des trucs quand même y’a ben des limites à la perte de temps!

Vive les kodaks sur les cells! Vive les filtres sur instacrotte, vive la fille qui a pris 1029 selfies d’elle-même au parc avec son chum qui voulait juste manger sa cuisse de poulet tranquille. Vive elle tellement into the selfie qu’elle a pas vu qu’on était six à la regarder à la table d’à côté. Vive elle qui s’est défait les cheveux, refait les cheveux, pris une photo avec la paille dans la bouche, la paille à côté de la bouche, avec une bouchée de poulet dans la bouche, sans bouchée de poulet dans la bouche. Une bouchée, une photo, une autre bouchée, une autre photo. Selon le DSM-V, la selfie c’est une maladie mentale. Chu d’accord. Vive cette fille-là qui sait sans doute même pas que dire : «Une selfie de soi-même», c’est un pléonasme. Fuck la monotonie alimentaire, vive les coupes de fruits pleines de hashtags, vive les bouchées de poulet mémorables, fuck les souvenirs dans la tête! Des souvenirs dans tête c’est comme lire un livre au lieu d’écouter un film, ça s’équivaut pas, les souvenirs dans la tête c’est un livre pour les pauvres qui peuvent pas se payer le cinéma. Les souvenirs dans la tête c’est quand tu veux pas vraiment te rappeler, sinon faut se faire soi-même son propre livre mental, ça gosse, quelle perte de temps! Fuck les pertes de temps.

J’ai vu des affaires. J’ai vu que le monde de 13 ans se prend en photo. Plusieurs fois par jour, j’ai vu que le monde de 13 ans se prend en photo. Ce monde-là crée des souvenirs tout le temps au lieu de réellement grandir dans une rencontre autour d’un McFleury ou bedon il chante, oui, sauf que c’est pour montrer la plupart du temps. On entre dans l’air de la démonstration du souvenir au lieu de l’émotion du souvenir. Une photo, c’est une demande d’amitié. Quand t’as une photo avec quelqu’un, ça devient ton ami. Après ça, il vient chez vous prendre d’autres photos avec toi pour montrer à vos amis communs que vous êtes amis. C’est ça que j’ai catché. Il faudrait leur dire à eux pis à nous aussi quand même qu’un souvenir c’est personnel. On l’oublie. Pas le souvenir estique, non, ça, on l’oublie pas, on en a quarante copies, ce qu’on oublie, c’est la sentimentalité du souvenir, ou pire! on l’invente. Avec un filtre soleil couchant.

J’ai déjà dit à ma collègue : «C’est niaiseux ce que je vais dire, mais j’aimerais ça être moins photogénique». C’est ben sûr qu’elle savait pas trop quoi en penser. Si je voulais me la jouer troisième degré je dirais que j’ai trop d’amis (une photo=demande d’amitié), mais c’est pas ça je feel pas troisième degré le premier me touche assez déjà. L’affaire c’est que, des fois je me dis que si j’avais une seule photo de moi par année mettons, genre devant ce qu’a l’air mon habitation, avec ce qui me sert de vêtements et avec les gens qui partagent mon quotidien, mettons un maximum de 5 personnes (l’exercice d’imagination ici est quand même hot), je serais quand même capable de me représenter pas pire mon année 1998 mettons, avec les souvenirs qui me servent encore, ceux-là qui m’ont fait grandir. C’t’en masse. Parce que là comme c’est là j’ai 2000 photos de moi sur lesquelles je look ben trop. Je regarde ça pis j’me trouve pas pire deg en ce moment, je regarde des photos de soupers de la semaine passée avec un filtre en soleil couchant dans mes beaux cheveux blonds bébé et je me dis que ce mardi-là j’étais à mon top de beauté, que je pourrai jamais égaler ça dans ma vie, que ma vie de beauté est finie. Je suis super triste quand je réalise à quoi je ressemble en ce moment dans mon miroir de salle de bain avec ma lumière qui flashe un peu sur mes cheveux blond pipi.

Avant même Facecrotte pis les affaires d’Internet de filtres pis de poses dans les champs avec des doigts en forme de cœur sur des bedaines prêtes à exploser pis de petites filles avec des broches pis des shorts de la même longueur que leur estime d’elles-mêmes (des shorts shorts, t’a pognes tu), même avant le kodak numérique, bref quand j’avais 14 ans, une de mes amies me forçait des fois à regarder avec elle des photos d’elle à 12-13 ans, de voyages avec ses parents. Elle me faisait remarquer comment sa peau avait l’air douce, comment ses hanches étaient pas toutes déformées, comment sa couleur de cheveux était bien réussie. Je sais pas pourquoi on faisait ça, en fait je le sais, elle aimait toujours mieux l’image d’elle dans le passé, en vacances, sul bord d’un lac, pas de hanches, c’était l’idéal atteint et à réatteindre. Elle dans le passé, c’était son elle préféré. Normal. La photo est prise, est finie, est là, pis tu peux jamais la recommencer, tu peux pas la changer, elle parle pas, tu lui fait dire ce que tu veux. L’affaire qu’on oublie, c’est qu’une photo, c’est une partie de la réalité, c’est jamais la réalité dans son ensemble. Même une vidéo. En tout cas j’espère pour moi parce que crime que ma voix gosse sur une vidéo. Un souvenir c’est pas fait pour être comparé, c’est fait pour être remémoré. C’est pas en compétition ni avec d’autres souvenirs, ni avec le présent. Le passé va toujours complètement torcher le présent en termes de popularité anyway, sauf si t’as souffert de bullying pis que tu t’en es sorti, mais c’est pas de ça que je parle.

Le passé c’est une image qu’on se fait avec des éléments qui nous arrangent pour l’avenir. J’pense.

Il y a eu plusieurs étapes à la construction de la nostalgie dans nos vies et un peu tout est responsable de ça, dont nous-mêmes, entre autres, (mais t’sais c’est surtout les autres là les coupables pas tellement moi parce que moi je suis responsable de pas tellement d’affaires là je subis surtout t’sais, les changements climatiques surtout ayoye je fais full pitié j’ai full chaud ☹).

Je nous trouve déjà fatigués, jeunes adeptes et fidèles abonnés de la nostalgie, paresseux du moment présent, vantards d’affaires normales. Je trouve plusieurs choses dommage qui se répondent toutes entre elles. Je trouve dommage que lorsqu’on jardine, on prenne notre jardin en photo pour le montrer au monde entier, je trouve ça très dommage. Je trouve ça très dommage de laisser des traces sur le web de notre mochaccino, je trouve ça très dommage. Je trouve aussi très dommage que le dimanche, on se TAG IN à une game de baseball, je trouve ça très dommage.
C’est triste de se faire greffer un cell dans la main gauche alors qu’on a encore besoin de nos deux mains pour tellement de trucs. Dire bonjour, entres autres.

Maintenant

Maintenant

Ben oui deux mains pour dire bonjour, d’une main tu tiens ton cell pis de l’autre tu fais coucou à ton ami sur FaceTime.

Les langues personnelles.

J’ai toujours l’impression que ce que je fais, j’étais censée le faire, en fait je dis j’ai «toujours» l’impression mais c’est surtout quand y fait full soleil dehors à peu près à ce temps-ci de l’année je me dis que je suis pas née pour rien, je me dis que y’avait une raison à mes parents, y’avait une raison à mes grands-parents, y’avait une raison au débarquement de Normandie (ouash quesser je dis là).

Me dire que je fais exactement ce que je suis censée être entrain de faire, ça m’arrive souvent aussi quand je suis avec mon ami Daniel. Daniel il parle pas ENCORE beaucoup français, mais on déjeune entre amis au restaurant et il dit : «Je peux chanter», je dis «Ok, then, chante, Daniel», il dit qu’il veut rapper finalement, je dis «Ok, rappe, Daniel, it is fine with me», Mag fait des beats sur la table, d’autres font des bruits de pet contrôlés dans leurs mains pour que ça fasse comme du beatbox, Daniel droppe the lines, il rappe, il dit : «Bonjour moi mon nom c’est Daniel, je souis avec mes amis, je mange le œuf Binidictine, je souis heureux maintenant que je souis avec vous, mes amis» on répond «Daniel, Daniel, Daniel, Héééé Hooooo Héééé Hooooo».

Je pense toujours trop loin genre je vais aux toilettes publiques et je me rends compte que les séchoirs pour les mains sont actionnés par un œil magique vis-à-vis la main gauche et je m’inquiète pour ceux qui ont juste une main droite. Ouais. Mais quand Daniel rappe à propos du fait qu’il est heureux avec les quelques mots qu’il connaît en français, moi je suis conquise de bonheur aussi, je pense pas plus loin que ça, on se voit une fois tous les quatre ans, mais on s’en fout on est amis, pis ses amis sont aussi mes amis, ainsi de suite. On s’est connus par hasard, les deux on était loin de la maison, on s’est dit bye en se disant à une prochaine fois, la prochaine fois est arrivée, il a invité ses amis chez nous, j’ai invité les miens, on a chanté, on a dansé, plus tard dans la soirée, il y avait un divan dans la rue, ils ont grimpé dessus en disant qu’ils faisaient du couchsurfing. C’est dans ce temps-là que je me dis que je suis exactement au bon moment au bon endroit avec les bonnes personnes t’sais.  Après ça, on se promène en voiture à six dans le coffre cinq sur la banquette arrière, y’a trois conducteurs qui s’obstinent pour le trajet y’a quatre copilotes, ça donne :

–       Where the fuckk are you going?!!!
–       Why are you so rude?? Say you’re sorry.
–       I am sorry. But there are also another thing I’ve always wanted to say in English.
–       Then say it.
–       Taxi, follow that car!

–       I like your bag.
–       Thank you. Look at the branding it says « Do Thebag »
–       I don’t understand it. What does it mean? Is it a joke?
–       I don’t know, I don’t think so.

–       I don’t know how to say it in English.
–       Then say it in German.
–       You speak German?
–       Nop, I don’t, I was only wondering if I could try to understand some words.
–       Ah!

–       Yeah but, how do you make it look poetic on scene if it is only about training and muscles, and sweating?
–       That’s was exactly what my thesis was about.
–       Oh! Interesting.

–       At some point of my life, I was some kind of a hippie.
–       Don’t say that! To me you were always super nice!
–       You don’t know what hippie means, don’t you?
–       Kinda.

–       Vous vous êtes couchés à quelle heure hier?
–       J’sais pas genre 5-6 heures.
–       Fuck, tu dois être magané.
–       Ouin on a jasé full longtemps dans le salon. On a jasé à défaut de frencher.
–       J’trouvais ça full long, je me demandais si t’allais venir te coucher un jour. J’pensais que…
–       Nah man, rien pentoute. Fuck y’est beau. Un moment donné je l’écoutais pu parler pentoute.
–       Peut-être demain, y’a l’air d’un gars sérieux.

–       What are you guys taking about?
–       Nothing!

Après ça c’est fini pour un petit temps, on recommence nos vies les uns sans les autres, sans parler anglais tout le temps, juste en parlant anglais de temps en temps à un client anglophone pis on a des frissons de guilty pleasure à parler anglais parce qu’on se dit qu’on est bon de parler anglais pis sérieux je pense qu’on devrait se sentir bon de se faire comprendre tout court dans n’importe quelle langue. C’est un exploit de parler à un an y’a pas de raisons pour que ça cesse les félicitations de parler, même en français ou en espagnol même si c’est juste un peu grâce à quelques cours pris par-ci par-là on dit tous qu’on sait parler espagnol pis quelqu’un nous dit : «Parle espagnol! :-D» et là c’est compliqué, mais ça peut fonctionner. Ça fonctionne en fait.

Des fois aussi t’entends du portugais dans l’autobus pis ton cœur s’emballe parce que dans ce que tu considères comme une autre vie tu parlais portugais, t’as envie de te retourner, de te vanter, tu voudrais dire : «Je parle portugais aussi eee je veux dire falo Portugues tambem!», mais tu dis rien, tu checkes ton cell, tu baisses le son de ta musique pour tout écouter ce qui se disent en portugais, t’es content de comprendre, mais tu fais rien comme un petit cabochon-niaiseux. Tu gardes ta langue apprise dans un petit tiroir dans ta tête, ben ben ben cachée, tu voudrais pas abimer ta langue étrangère, tes souvenirs, tu voudrais pas qu’on rit de tes re-premiers pas, tu voudrais pas déshonorer ta langue apprise, tu l’entretiens pas mais tu te dis que tu l’as en cas, pour les grandes occasions. Quand la grande occasion arrive t’es gêné de sortir ta langue apprise faque ta langue apprise elle meurt dans ton cerveau, c’est comme ça que les langues mortes se créent. Si y’a ben de quoi de pas personnel, c’est ben les langues apprises, mais ça devient quelque chose d’hyper intime qu’on veut garder pour soit à un certain point. Niaiseux qu’on est.

 

L’important, je l’ai compris en français dans ma tête. Après ça je l’ai dit à Daniel en anglais, j’ai dit : «The important thing, Daniel, is that we understand each other, so we can agree on : Which park will we go to play this afternoon?». Y’était d’accord, on s’est tappé dans la main. Y’a dit : «Je suis heureux avec mes amis, maintenant». J’ai pas ri de lui, j’ai dit : «Ok Daniel, on va parler français tout l’après-midi, tu vas te pratiquer». Y’a dit : «Ok! Cool! During dinner we’ll practice your Spanish».

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J’étais stressée, mais je me disais que c’était la bonne chose à faire ce soir-là.